La Bioaccumulation et Bioamplification

Figure 1. Schéma de la contamination de la chaîne alimentaire arctique par les PCB1

Nous avons tous déjà mangé du bœuf, du poisson et des légumes. Et nous avons aussi tous déjà utilisé de l’essence ou des produits nettoyants.

En quoi ces deux affirmations sont-elles reliées? Elles sont toutes les deux reliées aux concepts de bioaccumulation et de bioamplification.

Analysons d’abord la première : le bœuf, le poisson et les légumes sont trois êtres vivants qui font partie d’une chaine alimentaire, mais qui sont à des positions différentes de la chaine : c’est ce qu’on appelle des niveaux trophiques. Par exemple, au premier niveau trophique de la plupart des chaines alimentaires sont les producteurs, c’est-à-dire les plantes. On retrouve ensuite au deuxième niveau trophique les herbivores, comme le bœuf. Puis au troisième niveau trophique les carnivores, comme l’humain. On peut donc dire que chaque niveau trophique mange le niveau au-dessous de lui ou encore que chaque niveau trophique est mangé par le niveau au-dessus de lui.

La deuxième affirmation fait référence à la très grande utilisation et consommation par les humains de produits et matières qui, une fois rejetés dans la nature, sont des polluants et des contaminants pour la faune et la flore. Par exemple, notre utilisation de produits nettoyants crée l’eutrophisation des lacs (un processus qui retire l’oxygène de l’eau et élimine la vie) et notre besoin d’essence crée des marées noires. Ces polluants et contaminants se retrouvent donc dans la nature et peuvent être absorbés par les organismes vivants et ainsi avoir de gros effets néfastes.

Il existe énormément de chaines alimentaires selon les différents écosystèmes, mais il est possible de les classer en deux grandes catégories : les chaines alimentaires terrestres et les chaines alimentaires marines. Grâce à notre intelligence et notre technologie, l’humain se retrouve dans les plus hauts niveaux trophiques de ces deux catégories de chaines alimentaires. Nous avons donc une grande influence sur les niveaux du dessous, mais ceux-ci ont aussi un grand impact sur nous. En effet, les contaminants que nous relâchons s’accumulent dans les organismes que nous finissons par manger.

Figure 2. Schéma explicatif de la chaine alimentaire marine2

Voyons cela plus en détails en sein de la chaine alimentaire marine. Imaginons que moi, humain, je rejette dans l’eau du fleuve du mercure provenant d’une usine. Le premier niveau trophique, soit les algues, absorberont chacune 1 unité de mercure contenu dans l’eau. Puis, le deuxième niveau trophique, disons du zooplancton comme un copépode, mange 3 algues. Chaque copépode possède donc dans son organisme 3 unités de mercure. Le troisième niveau, comme le capelan, mange 3 copépodes, ce qui résulte à une présence de 9 unités de mercure dans son organisme. Et ainsi de suite tout au long de la chaine alimentaire. On réalise rapidement à quel point le prédateur au dernier niveau de la chaine alimentaire, comme le béluga ou l’ours polaire, possède de contaminant dans son organisme. Ce sont deux phénomènes que l’on appelle la bioaccumulation et la bioamplification6,7,9,10.

La bioaccumulation est l’accumulation de contaminants dans les tissus musculaires d’un individu au cours de sa vie, puisqu’il ingère les contaminants plus rapidement qu’il ne réussit à les dégrader. Plus l’individu vit longtemps, plus la présence de contaminant dans ses tissus sera grande7,10.

Figure 3. Augmentation du niveau de mercure chez un individu avec le temps10

La bioamplification, elle, est l’augmentation des concentrations de contaminants le long de la chaine alimentaire pour l’ensemble de l’écosystème. La concentration augmente donc d’un niveau trophique à l’autre7,10.

Figure 4. Augmentation du niveau de mercure au long de la chaine alimentaire10

80% des contaminants retrouvés dans la chaine alimentaire marine proviennent des nos activités à la surface. Les plus connus sont évidemment les déversements d’essences, de mercure, de pesticides, de produits ménagers et industriels (comme les PCB) qui réduisent la qualité de l’eau donc l’environnement des espèces vivantes, mais qui peuvent aussi créer des maladies, des cancers, des problèmes neurologiques et même entraîner la mort de la faune qui l’accumule. Il ne faut pas non plus oublier les produits pharmaceutiques comme les médicaments et les hormones. Par exemple, la pilule contraceptive contenant de l’œstrogène entraîne des problèmes de fertilité et de développement des organes reproducteurs chez plusieurs espèces de poissons ce qui est un risque pour la reproduction et la continuité des prochaines générations. Finalement, la majeure source que pollution marine est bien évidemment le plastique. Mais ce n’est pas aussi simple : on retrouve du plastique sous sa forme de bouteille ou de sac, mais ce sont les produits chimiques contenus dans le plastique et les microplastiques qui sont encore plus dangereux. Les produits chimiques se dissoudent dans l’eau et les microplastiques sont si petits qu’ils se retrouvent emprisonnés au niveau des systèmes respiratoires et digestifs des individus ce qui les empêchent de respirer et de s’alimenter convenablement3,4,8.

Comme mentionné plus haut, ce sont les bélugas, les orques, les oiseaux, les ours polaires et les autres prédateurs au sommet de la chaine qui accumulent le plus de contaminants dans leur organisme et qui sont le plus à risque d’en subir les effets négatifs.

Mais qu’en est-il de nous? Nous sommes aussi au sommet de la chaine alimentaire et nous nous alimentons d’animaux qui accumulent des polluants. Par exemple, le thon, la truite ou le flétan peuvent contenir une grande quantité de mercure et les moules une énorme quantité de microplastiques. Nous ne connaissons pas encore l’ampleur de tous les effets négatifs que ces polluants peuvent avoir sur notre santé, mais des problèmes circulatoires, des cancers et des malformations chez les enfants qui boivent le lait de leur maman en font partie. Il est donc primordial de surveiller notre consommation et de s’informer sur la provenance de nos aliments4,5. Mais avant tout, réduisons tous chacun notre pollution et notre empreinte écologique pour faire une différence sur notre santé et sur celle de toutes les espèces de la chaine alimentaire!

Catherine Morin
Biologiste

Références

Références

1. Grame. 2021. https://grame.org/blogue/demystifier-les-microfibres-et-trouver-des-solutions/

2. Éleau. 2021. https://eleau.org/ecologie/la-chaine-alimentaire/

3. The conservation. 2021. Why ocean pollution is a clear danger to human health.
URL : https://theconversation.com/why-ocean-pollution-is-a-clear-danger-to-human-health-152641

4. Miller, M., et al. 2020. Bioaccumulation and biomagnification of microplastics in marine organisms: A review and meta-analysis of current data. Plos One. URL : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7567360/

5. Sailor for the Sea. 2010. Bioaccumulation.
URL : https://www.sailorsforthesea.org/programs/ocean-watch/bioaccumulation

6. AlloProf. La bioaccumulation, la bioamplification et la bioconcentration.
URL : https://www.alloprof.qc.ca/fr/eleves/bv/sciences/la-bioaccumulation-la-bioamplification-et-la-bioc-s1202

7. National Geographic. Biomagnification and bioaccumulation. How can polluants have long-term effects on organisms?
URL : https://media.nationalgeographic.org/assets/photos/931/115/460ca1b4-b420-4b5e-8887-95e65f2be650.jpg

8. GaïaPresse. 2017. Pilule contraceptive, quel impact sur les poissons ?
URL : https://gaiapresse.ca/2017/04/pilule-contraceptive-quel-impact-sur-les-poissons/#:~:text=Les%20x%C3%A9n%C5%93strog%C3%A8nes%20dans%20les%20milieux,donc%20%C3%A9trangers%20de%20celui%2Dci.

9. St-Mars, G. 2022. Bioaccumulation vs Bioamplification.
URL : https://www.youtube.com/watch?v=3ywewmAELsE

10. DataStream. 2023. Le mercure.
URL : https://datastream.org/fr/guide/mercury

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